Quatre ans ferme requis contre l’exploiteur de misère
Le parquet a requis 4 ans de prison ferme
à l’encontre du propriétaire de 29
taudis au Gyptis,
« la plus insalubre
des copropriétés
de France ».

En m’y rendant avec les enquêteurs, j’ai pris mesure de l’ampleur de la misère, la pauvreté à l’état pur. Des détritus à chaque palier où prospèrent les cafards et les rats qui vous courent entre les jambes. C’est un labyrinthe d’appartements ouverts, des portes brûlées ou tenues par des chaînes. Un nom revenait à chaque fois, celui de Bensaïd. »
Le ton du réquisitoire du procureur Guillaume Bricier était donné pour fustiger « la frénésie mortifère d’acquisitions dans cette copropriété moribonde d’un prévenu qui se fait passer pour un bienfaiteur, un philanthrope ». De dénoncer « le système Bensaïd : acheter à vil prix, encaisser les loyers et la CAF, ne pas entretenir, ne pas payer les charges de copropriété, ne pas donner de bail, ni de quittance ». Le prévenu n’est pas un propriétaire dépassé, son profil l’en éloigne : Deug de math, ancien directeur chez McDo, délégué syndical, juge assesseur au tribunal des affaires de sécurité sociale et même candidat aux législatives ! « Il est avisé et investit massivement dans cette copropriété où il se circule librement. On n’achète pas innocemment 29 lots à vils prix dans la pire des copropriétés de France. Qui à part des personnes vulnérables peut habiter dans ces conditions d’habitat indignes ? Le Gyptis, c’est la dernière étape avant la rue et c’est à deux pas d’ici au cœur du Marseille populaire. »
aux damnés de la terre »
Aux yeux du procureur, le prévenu est dans la « même dynamique que Gallas » en référence à cet ancien policier de la PAF condamné l’an dernier à quatre ans de prison ferme pour la location d’une centaine de logements insalubres à des familles étrangères vulnérables. De requérir contre Aouel Abdelmajid Bensaïd la même peine de 4 ans ferme avec mandat de dépôt, 300 000 euros d’amende et 10 d’interdiction de gérer et d’acquérir des biens immobiliers.
« On ne peut pas en faire le seul responsable de ce désastre. C’est l’hypocrisie de ce dossier il faut un coupable et il est servi sur un plateau », a protesté en défense Me Isabelle Ansaldi qui n’a pas repris le discours victimaire de son client, soulignant que son client ne pouvait agir dans « cet immeuble tenu pas des trafiquants cagoulés en kalachnikov ».
« Je n’ai rien à faire ici Je voulais aider. Toute ma vie a été de faire du social. On peut dire ce qu’on veut, je n’ai jamais voulu gagner de l’argent sur les loyers », a redit le prévenu qui a reconnu « des erreurs ». « J’aurais pu être plus attentif. Je faisais confiance aveuglément au syndic. »
« C’est un homme d’affaires qui exploite la vulnérabilité des plus précaires qu’il soumet à l’indignité, un notable qui monnaye ses biens aux damnés de la terre », avait plaidé Me Flora Gilbert, en partie civile pour quatre travailleurs sénégalais sans papiers.
Le tribunal a mis son jugement en délibéré au 3 mars.