Des gendarmeries pointées pour leurs détentions
Un rapport met en lumière les conditions de détention indignes des personnes gardées
à vue dans trois gendarmeries du Gard.

les personnes détenues en garde à vue. PHOTO AFP
C’est un constat accablant que dresse le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) dans son rapport portant sur les visites des gendarmeries de Nîmes, Bouillargues et Le Vigan. Publié début mai, le document pointe une « configuration des geôles des sites visités [qui] garantit insuffisamment la dignité et la sécurité des personnes gardées à vue », notamment du fait de l’absence de douche ou d’un dispositif d’appel pour les détenus.
« Les conditions de détention étaient indignes, inhumaines et dégradantes », se désole Me Khadija Aoudia, avocate pénaliste, ancienne bâtonnière du barreau de Nîmes qui a également contrôlé ces lieux. L’avocate avait saisi en 2023 le tribunal administratif pour condamner l’État, qui avait finalement rejeté sa requête. Deux ans plus tard, rien n’a changé. « Cet état perdure depuis près de 20 ans », soupire Khadija Aoudia. « Pour quelle raison une personne qui est gardée à vue pendant 24h, 48h, 96h dans certains cas, ne bénéficie pas de douche ? Pourquoi ? Je peux comprendre qu’il y ait des difficultés, qu’on ne peut pas pousser les murs, mais les douches ? Il ne faut pas 30 millions d’euros pour en créer », s’indigne l’avocate pénaliste.
Des conditions matérielles dégradées et dégradantes qui suscitent, chez les personnes en détention, un sentiment d’infériorité, en témoignent « les commandes de l’éclairage électrique et de la chasse d’eau situées à l’extérieur des geôles et nécessitent l’intervention systématique d’un militaire pour les actionner », relève le rapport.
« C’est la démonstration du mépris que l’on témoigne à l’endroit de ceux qui sont privés de liberté au moment du placement en garde à vue », reprend Khadija Aoudia. À cela s’ajoute une surveillance insuffisante la nuit - faute d’effectifs des militaires - les « intervalles entre chaque ronde pouvant dépasser quatre heures », aucune cellule n’étant équipée de caméra. Surtout, le rapport soulève le manque d’accès aux soins, expliqué en partie par la désertification médicale. Une problématique qui donne lieu à des situations ubuesques, notamment au Vigan où les gendarmes décrivent « des médecins injoignables, sans obligation ni système de permanence, qui ne reçoivent pas les personnes gardées à vue entre deux consultations ».
Des situations indignes mais pas inéluctables. La solution se trouve notamment dans une meilleure considération des professionnels pour les personnes détenues. Mais également du côté de la politique pénale, où les magistrats sont poussés à être plus répressifs. « Il y a donc plus d’interpellations. Les infractions les plus visées seront les plus visibles - les stups, violences - commises par une certaine tranche de la population. Ce qui conduit un inconscient collectif à stigmatiser cette tranche de population dans laquelle il ne se reconnaît pas, pour laquelle il ne nourrit pas un sentiment d’égalité et de respect de la dignité. Or on rappelle que la transgression de la règle sociale n’est pas uniquement liée à un statut social, milieu social ou une zone géographique, mais est inhérente à la nature humaine. »